COMMUNIQUÉ - Alouettes de Montréal
Par Olivier Poulin
Edimestre : LCF.ca
«Mes parents m’ont toujours soutenu. Ce sont eux qui m’ont donné la chance de m’épanouir par le sport.» - Pierre Vercheval
Montréal - Dans l’univers du football québécois, tout le monde connaît Pierre Vercheval. Déménagé à Québec alors qu’il était enfant, plusieurs ignorent qu’il est né à Rocourt, en Belgique, une petite ville maintenant annexée à Liège qui a également donné au sport professionnel l’excellente joueuse de tennis Justine Henin.
Vercheval devient le premier Québécois francophone à faire son entrée au Temple de la renommée du football canadien, et ce, 27 ans après ses débuts au football, en 1980. C’était à sa dernière année à l’école secondaire. Curieusement, ce qui l’a motivé à jouer est lié à sa deuxième carrière, celle d’analyste football sur les ondes de RDS.
«Je trouvais ça beau à la télé!,» a confié Vercheval à LCF.ca. «Quand j’ai appris la nouvelle de mon intronisation, le vendredi avant la Coupe Vanier, j’étais sur les lignes de côté en Saskatchewan en regardant la pratique du Rouge & Or. Disons que j’étais agréablement surpris. J’ai eu une image de moi, quand j’ai commencé à jouer, sur les plaines d’Abraham, avec le Petit Séminaire de Québec.»
Au cours de sa carrière de 14 saisons chez les pros, il est devenu le premier Québécois de l’histoire à jouer dans plus de 200 matches de saison régulière dans la LCF. Il tirera sa révérence après en avoir disputé 212, en plus de 13 matches éliminatoires. Il fait partie de la dernière équipe, les Argonauts de Toronto, à avoir remporté la Coupe Grey lors de deux saisons consécutives, en 1996 et en 1997. Nommé sept fois au sein de l’équipe d’étoiles de sa division, il a figuré parmi celle de la LCF en 1992, 1994, 1997, 1998, 1999 et en 2000. Il a, entre autres, reçu le titre de joueur de ligne offensive par excellence de la LCF en 2000. En juillet 2006, à l’âge de 42 ans, il faisait son entrée au Panthéon des sports du Québec. Après seulement six ans au petit écran, il est déjà considéré comme l’un des meilleurs de sa nouvelle profession.
«Le Temple de la renommée, c’est le genre de chose que tu ne contrôles pas, la décision revient à d’autres gens. Ça arrive que tu y penses, surtout quand des gens viennent vers toi pour en parler. Un gars comme Chris Walby, qui est analyste à CBC et qui a été intronisé, m’en a beaucoup parlé, me disant qu’il était persuadé que ce n’était qu’une question de temps,» explique Vercheval. «Tu te laisses aller au jeu de la comparaison avec des gars qui sont déjà admis et tu crois en avoir fait assez pour recevoir l’appel. J’ai gagné deux fois la Coupe Grey, j’ai remporté des honneurs individuels dans un sport d’équipe, disons que j’y avais déjà un peu rêvé.»
La nouvelle a déclenché chez lui un processus de réflexion. Il s’est remémoré ses coéquipiers et ses entraîneurs. Jeune, Vercheval pratiquait tous les sports. Ses parents lui ont offert un soutien inconditionnel.
«Mes parents m’ont toujours soutenu. Ce sont eux qui m’ont donné la chance de m’épanouir par le sport,» a dit l’ancien joueur. «Quand j’ai décidé de jouer au football, j’ai dû changer d’école secondaire, ce n’est pas rien! Ils y ont cru et m’ont accompagné dans la démarche. À l’époque, les programmes de football ne pleuvaient pas au Québec. La situation était loin d’être semblable à ce qui se passe maintenant.»
En 1984, après deux conquêtes du Bol d’Or avec les Diablos du Cégep de Trois-Rivières, Vercheval poursuivra ses études… à Western Ontario?
«J’ai choisi Western après une discussion avec mon père, qui était un homme d’affaires qui ne parlait pas très bien anglais. Il m’a expliqué à quel point cette situation l’avait limité dans sa carrière et il ne voulait pas que je vive ça. J’ai donc opté pour Western. Les Mustangs avaient une belle tradition de football et, en matière d’immersion linguistique, on est dans le fin fond de nulle part, c’était clair que je n’avais pas le choix de parler anglais,» se remémore Vercheval, en riant.
L’aventure sera difficile. Il reviendra à Québec l’année suivante et prendra congé d’école pendant un an. Il retournera à Western après une saison passée avec les Citadelles de Québec au niveau junior. Sa persévérance portera fruit : en 1987, il reçoit le trophée J.P. Metras remis au meilleur joueur de ligne universitaire au Canada et est repêché par les Eskimos d’Edmonton. Il se joindra aux Eskimos en 1988 après avoir écoulé sa dernière année d’admissibilité avec les Mustangs et être devenu le premier Québécois à avoir participé à un camp d’entraînement d’une équipe de la NFL, les Patriots de la Nouvelle-Angleterre.
«Cela a été l’une de mes plus belles expériences,» a indiqué Vercheval. «On pratiquait deux fois par jour pendant plus de trois heures. J’ai tenu le coup pendant cinq semaines et demie, puis j’ai été libéré. Quand je suis arrivé à Edmonton, je me disais que si j’avais pu endurer le traitement pendant tout ce temps chez les Patriots, rien n’allait m’impressionner à Edmonton. En plus d’être un meilleur joueur, j’étais beaucoup plus solide entre les deux oreilles.»
Après quelques semaines à Edmonton, l’entraîneur-chef Joe Faragalli, lui a dit : «J’ai entendu plein de bonnes choses à ton sujet le jeune, va-t-en sur le terrain, montre-moi ce que tu sais faire.». Vercheval n’oubliera jamais ce vote de confiance, de même que l’influence qu’ont eue sur lui ses premiers confrères de tranchée. Parmi eux figure Rod Connop, membre du Temple de la renommée, qui n’a jamais hésité à partager ses trucs au profit de meilleures performances de tous sur le terrain. Vercheval appliquera la recette partout où il jouera.
Après cinq saisons à Edmonton, le joueur de ligne tentera une ultime fois sa chance dans la NFL avec les Lions de Détroit. Il avait besoin de le faire, pour éliminer le doute; après tout, il était passé bien près la première fois et il misait, cette fois-ci, sur ses cinq saisons d’expérience.
«Je sentais que je devais y aller une autre fois, je devais aller au fond des choses. L’entraîneur de la ligne là-bas était un fin technicien. J’ai tellement appris pendant mon séjour. Je suis revenu au Canada un bien meilleur joueur,» analyse Vercheval.
Il signera une entente avec Toronto. C’est avec eux qu’il vivra l’un des plus beaux moments de sa carrière, la conquête de sa première Coupe Grey.
«1996 a été une saison difficile pour moi. Je m’étais cassé une jambe contre les Alouettes en août. Je suis revenu au jeu lors du dernier match de la saison. Ma jambe tenait le coup et j’ai passé les éliminatoires sans problème. Le match de la Coupe Grey, cette année-là, se passait à Hamilton pendant une tempête de neige! On jouait contre les Eskimos en plus! Un vrai festival offensif qui s’est terminé 43-37. J’étais l’un des capitaines des Argos, j’étais donc sur le podium pour recevoir la Coupe Grey. J’ai été l’un des cinq premiers à y toucher. Je me souviendrai toujours quand j’ai soulevé la coupe, la neige tombait. C’était féerique,» raconte-t-il.
«J’ai eu la chance d’évoluer au sein d’excellentes équipes chez les pros : Edmonton, Toronto et Montréal. Pour accéder au Temple de la renommée en tant que joueur de ligne, il faut avoir joué au sein de bonnes équipes. Sinon, c’est difficile. Je n’ai jamais touché au ballon, je n’ai pas de statistiques!»
Lorsqu’on demande à Vercheval ce qui faisait sa force comme joueur, la réponse ne tarde pas à venir et il est difficile de ne pas faire un lien avec une certaine joueuse de tennis belge.
«Ça va faire drôle, mais je pense que c’est mon jeu de pied! J’ai beaucoup raffiné ma technique lors de mon passage à Détroit. Je n’étais pas le plus gros. Je n’étais pas du genre à m’imposer en puissance, ce que l’on m’a parfois reproché, mais ce n’était pas mon style. J’ai travaillé les angles d’attaque des bloques toutes ma carrière. Je dirais aussi que j’ai été un joueur constant. C’est l’objectif d’un joueur de ligne. Après tout, comment fait-on pour mesurer l’efficacité d’un joueur qui n’a pas de statistiques? Dans le cas des joueurs de ligne, c’est simple : est-ce que le jeu a fonctionné ou pas? Je tentais de gagner la bataille du pourcentage.»
Son pourcentage devait être excellent.